Dr David Marsil, le lion du Nord

Même si c’est à Saint-Timothée, près de Salaberry-de-Valleyfield, qu’il voit le jour en 1835, David Marsil devient dès sa jeunesse l’un des personnages les plus importants et les plus intéressants de l’histoire de Saint-Eustache. Aujourd’hui peu connu du public, il est admiré par plusieurs de ses contemporains pour sa carrière exceptionnelle de médecin chirurgien, son implication politique et son combat personnel pour la commémoration des patriotes de 1837-1838.

Une voix puissante qui retentit, une forte carrure, une longue et généreuse chevelure ainsi qu’une détermination et un courage à toute épreuve : voilà les principales caractéristiques de David Marsil qui amènent ses amis et collègues à lui donner le noble surnom de « lion du Nord ». Pour mieux comprendre le respect qu’il suscite, il faut se pencher sur le parcours politique de ce médecin eustachois.

David Marsil vers 1870. (Archives de la Ville de Montréal. Fonds Aegidius Fauteux.)

Marsil est d’abord un homme entièrement dévoué à sa communauté qu’il sert avec un sens aigu du devoir. Il a la réputation d’être présent à tous les rassemblements et évènements publics de la région. En 1891, par exemple, c’est lui qui remet le premier prix du Mérite agricole au cultivateur eustachois Charles Champagne. En 1896, il prononce un discours en l’honneur des Trappistes, une communauté de moines installée à Oka. Très religieux, l’homme à la barbe généreuse est un habitué des assemblées de marguilliers et occupe les différentes charges honorifiques de sa paroisse. Il joue d’ailleurs l’orgue tous les dimanches, et ce, pendant plus de 30 ans. Le chirurgien eustachois assume aussi la présidence de la Commission scolaire de Saint-Eustache de 1870 à 1873, puis en 1894, suivant ainsi les traces d’autres personnages importants de Saint-Eustache comme le curé Jacques Paquin et le docteur Jacques Labrie.

Le médecin de Saint-Eustache fait officiellement le saut en politique en 1868 lorsqu’il devient conseiller municipal. Trois ans plus tard, il est élu maire du village, une charge qu’il occupe jusqu’en 1875. Malgré sa popularité, il décide alors de ne pas renouveler son mandat. C’est d’ailleurs durant son parcours en politique municipale qu’est créé le premier service de lutte aux incendies de Saint-Eustache.

David Marsil vers 1890. (Le Monde illustré, vol. 15. no. 770 (4 février 1899). p. 625.)

Très connu et jouissant d’une bonne réputation auprès de ses compatriotes, David Marsil décide de se présenter sous la bannière libérale aux élections provinciales de 1878 et aux élections fédérales de 1887. Il se fait vite remarquer au sein de la classe politique par son éloquence et sa voix portante qui font vibrer les partisans, observations qui demeureront vraies pendant toute sa carrière. Cependant, la popularité du Parti conservateur dans le comté des Deux-Montagnes est telle que Marsil perdra ses deux campagnes électorales, en 1878 comme en 1887.

Jamais candidature ne s'est présentée sous des couleurs plus favorables. L'éloquence de M. Marsil, son patriotisme éprouvé, créent un véritable enthousiasme dans toutes les parties du comté.

La popularité du docteur atteint un sommet durant l’année 1885. En effet, il prend alors la parole à de nombreuses assemblées pour défendre le chef métis Louis Riel, emprisonné et condamné à mort par le gouvernement canadien pour sa participation à la rébellion du Nord-Ouest. Comme la majorité des Canadiens français de l’époque, Marsil est ému par l’histoire du dirigeant métis, d’autant plus que pour lui, les ressemblances avec l’histoire des patriotes sont frappantes. Il voit en Riel un cousin et tente de le sauver de la peine de mort en mobilisant l’opinion publique. Lors de ses discours, l’Eustachois partage la scène avec certaines des plus grandes figures nationalistes de l’époque, dont le premier ministre québécois Honoré Mercier, le poète Louis Fréchette et le journaliste Laurent-Olivier David.

Dans les luttes politiques, il avait l'éloquence qui plaît aux partisans et soulève l'enthousiasm; dans les fêtes nationales, il incarnait les aspirations de notre peuple.

En 1888, David Marsil est nommé au Conseil législatif de la province de Québec – l’équivalent québécois du Sénat canadien –, une des fonctions les plus prestigieuses de l’époque. Le premier ministre Honoré Mercier y voit une façon de récompenser le dévouement de l’Eustachois envers la nation canadienne-française, mais aussi un moment de marquer des points politiques auprès des électeurs libéraux! Marsil, désormais surnommé le « vieux lion du Nord » avec affection, restera en poste jusqu’à sa mort en 1899.

Ah! David Marsil a pu commettre des erreurs, mais il n'a jamais eu peur d'émettre son opinion.

Découvrez la micro-exposition itinérante Dr David Marsil, le lion de Saint-Eustache (1835-1899), présentée sur le site de l’Espace muséal du manoir Globensky jusqu’à la mi-décembre.

Références bibliographiques

BERTRAND, Gilles. « Analyse des structures sociales et des groupes dominants dans le village de Saint-Eustache (1850-1880) », Mémoire de M.A., Université du Québec à Montréal, août 1977.

BOILEAU, Gilles. « Dom Antoine Oger, premier abbé d’Oka », La Varlope, vol. 6, num. 1, juillet 2005.

BOILEAU, Gilles. « La vie à Saint-Eustache en 1894 », Cahiers d’histoire de Deux-Montagnes, vol. 14, num. 1.

BOILEAU, Gilles. « Saint-Eustache aura enfin son aqueduc », L’Éveil, 1er février 1983.

« Bureau du Greffier de la Couronne en Chancellerie », Gazette officielle du Québec, 8 septembre 1888.

DAVID, L.-O. « David Marsil », L’Avenir du Nord, 3 février 1899.

L’almanach du peuple de C.O. Beauchemin & Fils pour l’année 1900 (Montréal : C.O. Beauchemin & Valois, 1900).

La Minerve, 10 janvier 1891.

LAURIN, Clément. « David Marsil, médecin et patriote de Saint-Eustache », Cahiers d’histoire de Deux-Montagnes, hors-série, été 1978.

LAURIN, Serge. Rouge, Bleu : la saga des Prévost et des Nantel : chronique d’un siècle d’histoire politique dans la région des Laurentides (Québec : Presses de l’Université Laval, 1999).

L’Écho des Deux-Montagnes, 6 novembre 1890, p.71.

Le Soleil, 28 janvier 1899.

L’Illustration, 4 avril 1932.

« Souvenirs de 1885 », Le Canada, 11 juin 1912.

Qui a écrit cet article?

Anthony M. Lafontaine est détenteur d’un baccalauréat et d’une maîtrise en histoire de l’Université de Montréal. Auteur publié, il a occupé différents emplois en centres d’archives ainsi qu’au sein du monde municipal. Il est chargé de projet pour Patrimoine culturel Vieux-Saint-Eustache depuis septembre 2021.

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